chanson de gestes

Nom ▲ Medeiros ; Prénoms ▲ Raquel ; Date et lieu de naissance ▲ le dix mai, au Brésil, dans un hameau perdu au milieu de nulle part ; Age ▲ vingt-quatre ans ; Particularités ▲ corps sculpté par la danse, coup de cygne, jambes fuselées ; Profession ▲ danseuse contemporaine dans une troupe de passage à New-York pour un grand ballet ; Orientation sexuelle ▲ hétérosexuelle, mais sans grand désir ; Statut Civil ▲ célibataire ; Statut Sociale ▲ aisée, mais cela ne se voit dans aucune de ses manières, sauf quand la tentation se fait sentir au plus profond de son ventre  Race ▲ possédée par l'âme volubile de Salomé, la danseuse mythique, celle qui fait tomber les têtes ; Caractère ▲ passionnée, froide, volcanique, irritable, lascive, arrogante, généreuse, raisonnable, persévérante, rieuse, et tellement vide pourtant ; Son groupe ▲ behind the blue eyes ; Avatar ▲ Sarah Stephens; Crédits ▲ ... ;

(un) le quotidien de Raquel est rythmé par la danse. Entre les répétitions et les représentations, les essais costumes et les ateliers chorégraphiques, elle a consacré sa vie à la danse, elle ne connaît rien d'autre. Tout son corps est sculpté par les heures à l'assouplir, à le rendre plus dur, à lui apprendre à faire les plus belles courbes. Avec ses seins menus et ses cuisses puissantes. Et elle n'en fait jamais assez à son avis. Elle pousse encore plus loin la performance. Elle reste tard la nuit dans le studio. Elle est la première le matin. Elle saute des repas si le geste n'est pas parfait. Elle s'épuise, elle se casse. Elle tourne, encore et encore. Les pirouettes s'enchaînent et elle perd la tête. Elle vit dans le flou artistique. (deux) Les hommes sont séduits et deviennent séducteurs, mais elle ne joue pas. Elle laisse son corps dansé autour des autres, mais elle garde ses distances. Ils sont nombreux ceux qui ont voulu croquer, mais ils se sont brisés contre l'iceberg, ce coeur qu'on ne peut attendrir. Elle montre les crocs, elle hausse un sourcil et elle attend que vous partiez sagement trouver un autre bout de viande. Ils l'agacent prodigieusement. Certains se demandent si la belle n'est pas, par hasard, encore bien pure. Si certaines histoires existent dans la troupe, elle n'en fait jamais partie. (trois) Sa place dans la troupe, elle ne la doit qu'à sa force de caractère. Elle a tout fait pour réussir, alors qu'elle vient d'un milieu où il n'y avait rien, et encore moins la place pour une carrière artistique. Elle est montée aux Etats-Unis encore très jeune pour aller dans une école de danse prestigieuse. Elle s'est coupée complètement de ses origines, elle a accepté la plus grande solitude juste pour montrer qu'elle savait le faire. L'ambition, encore plus que la danse, a été son plus grand moteur. Si elle perdait les moyens de suivre ses ambitions, elle n'aurait plus rien.  (quatre) Alors qu'elle a des allures de princesse, elle a toujours vécu dans le dénuement le plus total, le plus paralysant. La pauvreté, elle connaît. Cela ne fait que depuis peu qu'elle se permet des libertés. Elle peut se faire plaisir, mais elle n'en a pas le goût. Elle n'aime ni les choses inutiles, ni les petits plaisirs à gros budget. Parfois, elle se sent vide de désir. Elle se contente de peu parce qu'elle ne veut rien. Elle se demande parfois quand est-ce qu'elle a perdu la sensation du plaisir. Quand est apparu ce vide. (cinq) Alors qu'elle habite depuis longtemps aux Etats-Unis, elle a toujours du mal avec la langue, qu'elle a apprise sur le tas. Elle se mélange les pinceaux, n'a pas suffisamment de vocabulaire, ne sait pas comment s'exprimer correctement. Une grande part de sa frustration dans ses rapports humains vient de là, tout simplement. Et en même temps, elle met un point d'honneur à ne pas s'exprimer avec la langue de son enfance avec les autres. Alors elle se tait. Et elle fusille des yeux ceux qui la regardent avec commisération, la petite étrangère qui a bien du mal à s'exprimer, la pauvre. Elle leur arracherait bien la langue. (six) la troupe de danse n'est installée à New York que depuis un mois. Un mois de répétition intense qui précède les premières représentations d'un ballet où Raquel a l'un des rôles principaux pour la première fois de sa vie. Elle n'a pas le droit à l'erreur, c'est le tournant de sa carrière dans la troupe. L'installation à New York n'est que provisoire, les premières représentations seront succédées par une grande tournée américaine, puis peut-être européenne. Alors Raquel ne prend pas trop ses marques, ne se glisse pas vraiment dans la vie new-yorkaise, d'autant plus que la troupe vit ensemble en permanence. (sept) Elle ne s'habille qu'en tenue légère, en robe, et en jupe, en chemise fluide, en pantalon élastique. Elle a rarement les cheveux attachés, sauf quand elle danse, et même à ce moment là, elle les lâche souvent. Elle a toujours son manteau ouverte, et son fouloir noué lâchement autour du cou. Elle a un sac à main minuscule qui contient trois fois rien. Sur son visage, il n'y a que ses lèvres qu'elle maquille, ses lèvres qui d'elles mêmes font parler d'elles. (huit) Raquel ne fume pas, ne se drogue pas, ne se donne pas de plaisir, ne se scarifie pas, ne se lamente pas, ne s'écrase pas, ne se laisse pas aller, ne s'invente rien, ne rêve de rien, n'existe plus vraiment. (neuf) Il y a surtout cette fureur de danser, cette envie irrépressible de faire bouger ce corps en n'importe quelles circonstances. De faire glisser ses pas, d'avoir un geste fluide du bras, d'avoir un cou long et incliné. De faire voltiger ses cheveux d'un, puis d'un autre. De demander l'impossible pour ne rien avoir. De voir mourir les hommes pour elle, face à la cadence de ses pas. De devenir accessible, puis inaccessible. De faire languir les autres. De jouer avec les corps et de les repousser toujours plus loin. (dix) Raquel ne sait plus qui elle était. Tout ce qu'elle sait, c'est qu'elle n'était pas tout à fait ce qu'elle est aujourd'hui. Et qu'elle ne sait pas comment retrouver ce qu'elle était hier. Mais peut-être que Salomé sait.

ON SE CROISE : ils se sont croisés plusieurs fois, au détour d'une rue, ou d'un bar, ou d'un restaurant, ou même près du studio de danse, qu'importe. ils se voient, juste du coin du regard, ils se bousculent parfois, juste par inattention. ils ne se parlent pas, même pas un sourire. ou peut-être juste un seul, pour dire qu'ils se sont reconnus, qu'ils savent que l'autre passe et croise. mais cela est amené à changer, il (ou elle) est amené à la percuter pour de vrai.
TOURNE, TOURNE : un jour elle est entrée dans cette boîte de nuit avec deux des filles de la troupe, comme ça, pour s'amuser. elle n'aime pas vraiment ça. elle n'aime pas spécialement ses corps sans grâce et sans technique. mais cette fois-ci elle s'est perdue, son corps a été livré à lui-même, et elle n'était plus Raquel, elle était Salomé, la grande tentatrice, celle qui fait tomber les têtes par ses hanches sensuelles. Et elle a séduit, comme jamais auparavant. Raquel n'a rien compris, ne veut pas voir son pouvoir de séduction. mais l'aguicheuse au fond d'elle-même aime tellement ce jeu.
TÊTE SAINTE : il y a comme quelque chose qui a vibré en elle quand elle l'a vu. comme un frisson et la nausée aussi. elle l'a reconnu, mais elle ne sait pas d'où. elle l'a reconnu. c'est ce saint, cet homme béni des dieux, dont elle doit précipiter la chute. dont elle doit envoûter l'âme pour mieux la perdre. elle l'aime déjà. elle aime toute la décadence qu'elle va lui faire connaître. elle aime sa tête décapitée sur son plateau argent. il fait émerger ce qu'il y a de pire en elle, Salomé.